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sexta-feira, 21 de janeiro de 2011

A Grande Transformacao - Kemal Dervis

Kemal Dervis, économiste de la Brookings Institution, à Washington
"Comment redistribuer la nouvelle richesse ?"
Bilan du Monde, 20.01.2011

Dans un entretien accordé au Bilan du monde (en vente en kiosques depuis le 17 janvier), l'économiste Kemal Dervis explique que le rattrapage de l'Occident par les pays émergents est un fait acquis. Mais ce basculement de l'histoire laisse entier le problème des inégalités entre les nations, comme en leur sein.

Les économistes se disputent pour savoir si la bonne santé économique des pays du Sud est encore liée à celle des pays du Nord, ou s’ils ont acquis une dynamique propre qui signifierait, à terme, le déclin de la domination économique occidentale au profit des nouvelles nations émergentes. Quelle est votre opinion ?

Kemal Dervis : En termes de produit intérieur brut (PIB), il y a bien une convergence entre pays avancés et émergents depuis la fin des années 1980 : ces derniers croissent plus vite que les premiers. Mais cela ne devient globalement le cas, en PIB par tête, qu’à partir de 1999, une fois passée la crise asiatique de 1997.

Cette convergence s’accélère à partir de 2008, parce que la crise touche d’abord et plus fortement les pays avancés ; et elle devrait encore s’accélérer dans les cinq années à venir, si l’on en croit les prévisions du Fonds monétaire international, en PIB comme en PIB par tête.

C’est donc une tendance durable et inédite, et non une période intermédiaire, en attendant un rebond spectaculaire des pays avancés ou un ralentissement marqué de la croissance des pays émergents. Nous sommes bel et bien entrés dans une nouvelle ère historique.

Pourtant, les pays émergents aussi ont vu leurs performances érodées par la crise, tout comme les pays avancés.

Certes, mais le découplage concerne les tendances structurelles de la croissance, et non les cycles économiques de court terme. Si l’on élimine les effets de ces cycles des tendances longues, il s’avère que le découplage des taux de croissance intervient dès les années 1980 pour les pays d’Asie de l’Est et du Sud-Est, et à partir de 2000 pour l’ensemble des pays émergents comme pour les pays les moins avancés (PMA, les plus pauvres de la planète). Il y a aussi une plus forte corrélation entre les émergents et les PMA qu’entre les émergents et les pays riches.

A l’inverse, si l’on ne considère que les évolutions cycliques, alors, le couplage demeure, en raison de l’interdépendance croissante entre les économies de la planète, due à la progression des échanges et des flux financiers mais aussi aux facteurs psychologiques : la panique financière, tout comme l’exubérance, est contagieuse.

Comment expliquez-vous cette convergence ?

La technologie travaille désormais en faveur de la convergence, parce que les transferts de technologies sont de plus en plus rapides. La mondialisation a accéléré le rattrapage technologique de beaucoup de pays émergents.

De plus, surtout en Asie, le taux d’épargne y est beaucoup plus élevé que dans les vieilles économies du Nord. Cela leur permet d’investir beaucoup plus, d’importer les technologies à grande échelle et de réaliser des gains de productivité impressionnants. Au cours des dix dernières années, la part de PIB consacrée aux investissements par les pays de l’Asie émergente s’est élevée à 37% en moyenne, contre 20% à 22% dans les autres pays émergents et 18% seulement dans les pays avancés. Ces augmentations de productivité liée à l’investissement et à l’adaptation de technologies importées se développent aussi à l’intérieur d’un même pays, entre les régions, voire entre les entreprises.

Les réserves de productivité demeurent encore très importantes, même en Chine, parce qu’il reste beaucoup de régions et d’entreprises qui pourront suivre l’exemple des régions et des entreprises les plus avancées. Les facteurs démographiques sont aussi un avantage important. Sauf en Chine, la population est plus jeune que dans les pays avancés, et un pourcentage plus élevé de la population peut donc être économiquement actif.

Cela signifie-t-il un déclin des économies occidentales ?

Non, les pays avancés ne vont pas s’appauvrir, mais ils croîtront moins vite, et il sera difficile pour leurs populations, psychologiquement et politiquement, de voir le PIB par tête augmenter trois fois plus vite dans d’autres pays, même si leur niveau de vie moyen restera plus que trois fois supérieur.

Pour la première fois depuis des siècles, les plus grandes puissances économiques mondiales ne seront plus, dans dix ou vingt ans, celles qui auront le plus haut niveau de vie moyen. Cela ne manquera pas de créer des tensions majeures dans l’ordre économique international. Le mouvement du G7 vers le G20 reflète le début de ce rééquilibrage.

Existe-t-il un lien entre ce basculement de la création de richesses et l’accroissement du chômage et des inégalités dans les pays avancés ?

Oui, car l’accélération des échanges entraîne une compétition sur le travail par la baisse des coûts, ce qui engendre des délocalisations et restructurations qui contribuent souvent à une concentration des revenus au sein des économies nationales.

Les nouvelles économies d’échelle et la mondialisation sont plus favorables au capital et au travail qualifié, plus mobiles que le travail peu qualifié. La croissance des inégalités, non seulement au sein des pays avancés, mais aussi dans beaucoup des pays émergents, est le facteur le plus préoccupant de cette nouvelle donne.

Mais il existe des moyens politiques d’y remédier. Après tout, les mêmes forces de la mondialisation et de la diffusion technologique ont touché également l’Europe et les Etats-Unis ; pourtant, la distribution des revenus y est sensiblement différente, surtout avec les pays scandinaves, parce que d’autres aspects entrent en jeu : les institutions, les rapports de forces politiques et sociaux, la façon dont les politiques publiques sont capturées ou pas par des intérêts économiques privés.

Certains économistes "intégristes" du marché sous-estiment l’importance de la politique et de la négociation sociale dans la détermination de la distribution des revenus. Du côté des émergents, on peut également lutter pour une meilleure redistribution : regardez l’exemple du Brésil de Lula qui a réussi à faire baisser les inégalités, bien qu’elles y demeurent élevées !

Mais le rythme de croissance actuel des pays émergents est-il soutenable ?

Beaucoup de variables sont difficiles à prédire. Mais je pense qu’à moyen terme, sur les dix ou vingt prochaines années, les grandes tendances que j’ai évoquées plus haut sont assez claires, bien que, dans chaque pays, des circonstances particulières peuvent freiner ou accélérer le mouvement. La gestion politique de l’équilibre social va jouer un rôle important. Sur le plus long terme, je ne pense pas que, même à l’horizon de la seconde moitié du XXIe siècle, il y aura nécessairement une pénurie de ressources naturelles qui bloquerait la croissance.

Mais nous aurons besoin de technologies révolutionnaires pour protéger le climat et économiser certaines ressources limitées. Et ces technologies ne pourront se développer à temps que si les politiques économiques encouragent leur développement, ainsi que des comportements respectueux de l’écologie de notre planète.

La croissance économique est-elle le seul indicateur à considérer ?

Bien sûr que non, même s’il est important.

Les pays qui ont connu la plus forte croissance de leur revenu national sur la période 1970-2010, par exemple la Chine, ne sont pas forcément ceux qui ont connu la plus forte croissance de leur indicateur de développement humain (IDH, qui inclut des données sur l’espérance de vie, le niveau d’éducation…), comme Oman ou le Népal.

Par ailleurs, le PIB moyen par tête masque souvent une inégalité croissante des revenus à l’intérieur d’un même pays, voire un appauvrissement des groupes les plus vulnérables, souvent lié a l’insuffisance de ce que l’Organisation internationale du travail appelle le "travail décent". Ce qui pose une fois de plus la question de la répartition de cette nouvelle richesse et de la gestion de l’équilibre social. Et cette question n’est pas seulement économique, elle est aussi politique.

Propos recueillis par Antoine Reverchon

"Bilan du monde" 2011. La situation économique internationale. Le Monde, 188 pages, en vente en kiosques 9,95 euros.

Un théoricien et un praticien de l'économie globalisée
Kemal Dervis a rejoint, en mars 2009, la Brookings Institution, un think tank proche du Parti démocrate basé à Washington, où il est vice-président et directeur du "Global Economy and Development Program".
Né en 1949 à Istanbul, d’un père turc et d’une mère germano-néerlandaise, Kemal Dervis a étudié à la London School of Economics et à Princeton.
En 1977, il rejoint la Banque mondiale, où il occupe diverses fonctions jusqu’en 2001, et y gère, en particulier, les programmes de réduction de la pauvreté.
En mars 2001, il est nommé ministre de l’économie dans le gouvernement turc de Bülent Ecevit, où il devra affronter les effets locaux de la crise économique mondiale. Il démissionne en 2002.
En 2005, il prend la direction du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).
Kemal Dervis a notamment publié, avec Ceren Ozer, A Better Globalization : Legitimacy, Governance and Reform (Brookings Institution, 2008).

Le "Bilan du monde"
Le Bilan du monde 2011, édité par Le Monde, en vente en kiosques depuis le 17 janvier, dresse un panorama de la situation économique internationale au cours de l'année écoulée. Une partie thématique analyse les faits marquants de 2010 – la Chine superpuissance, l'euro en crise, le tournant de la rigueur, la peur du déclassement, la guerre des monnaies, etc. – rassemblés dans trois grands chapitres (International, France, Entreprises) et illustrés par une série de portraits (Zhou Xiaochuan, Xavier Musca, Marius Kloppers).
Les journalistes et correspondants du Monde ont été mis à contribution pour le traditionnel "Atlas" de 179 pays, de l'Afghanistan au Zimbabwe. Chaque fiche-pays est accompagnée d'une carte qu'accompagnent des données de base (chef de l'Etat, premier ministre, superficie, population, monnaie, etc.). Des encadrés traitent plus particulièrement des paradis fiscaux, du Kosovo (pas encore reconnu par les Nations unies) ou de la Palestine.

Ce Bilan du monde, enfin, contient un CD-Rom réalisé par Le Monde, en partenariat exclusif avec l'Insee, sur "Les revenus et le patrimoine des ménages".

Bilan du monde 2011, 188 pages, en vente en kiosques 9,95 euros.

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